Le compositeur, le réalisateur, le producteur

Les différents points de vue :

Le compositeur, le réalisateur, le producteur

Les différences de points de vue vont être quelque chose d’absolument essentiel  si vous voulez être un compositeur de musique de film. Il est important de comprendre que le réalisateur parle avec ses intentions de cinéaste et avec les intentions du scénario. Mais il n’a pas toujours l’approche analytique de la musique. Par exemple, il n’est pas toujours capable de discerner si votre musique aurait super bien marché si elle avait été jouée aux cordes, alors que là, vous la présentez et jouez avec des instruments électro ou avec du piano. Et du coup il la perçoit différemment. Il ne se rend pas compte qu’il suffit, en un clic, de changer l’instrument pour que tout d’un coup ça corresponde à ce qu’il attend. Mais souvent, il n’arrive pas analyser tout ça. Là est toute la difficulté!

Une écoute globale qui inclut la composition mais aussi l’arrangement. Par exemple,  si vous vous dites: Je vais vous présenter mes thèmes au piano et on pourra avoir une idée du genre de thème que vous voulez avant de se lancer dans un travail d’arrangement etc… mais les réalisateurs ont de plus en plus perdu  la culture d’entendre les thèmes au piano. Ils sont habitués à la MAO et ils sont habitués à entendre un produit fini. Quand Luc Besson a fait Valérian avec Alexandre Desplat, Alexandre Desplat a du faire des arrangements en MAO très poussés. Parce que, comme ça n’était pas définitif, , il n’arrivait pas à se prononcer. Donc cela inclut également le mixage car si tout est déséquilibré, ça peut déstabiliser le réalisateur qui trouve que ça ne sonne pas comme il faut.

Les conditions d’écoute.

Cela peut parfois être délirant avec un réalisateur. Vous lui fait écouter votre musique, vous la lui envoyée par internet, il l’écoute sur son poste de travail, ça ne lui plaît pas du tout! Vous le  faite venir au studio, vous lui faites écouter la même musique dans des conditions de studio où il entend un bon son, un bon équilibre et là tout d’un coup il est  persuadé que c’est complètement différent et que cette fois-ci c’est fantastique! C’est la difficulté du réalisateur qui n’a pas l’analyse si quelque chose le perturbe. Il ne sait pas d’où ça vient et il se dit que globalement que ça ne lui va pas, alors que si ça se trouve, il suffirait de changer un paramètre. C’est pour ça qu’il faut être capable de travailler très vite et de travailler éventuellement en présence du réalisateur quand se retrouve devant des situations de blocage.

Le producteur.

C’est celui qui va vous payer. Donc sa préoccupation est différente. Il se demande si vous allez livrer à temps, si vous avez déjà fait vos preuves, si vous avez des références. Il ne faut pas oublier qu’un producteur rend des comptes à une chaîne de télé, ce qui n’est pas facile, ou aussi à un distributeur. Une chaîne de télévision peut imposer qu’il y ait un appel d’offre de compositeurs.Des fois, la chaîne de télé est obligée de faire une mise en concurrence.

Pourquoi les compositeurs qui lisent et parlent le solfège couramment utilisent-ils la MAO?

Ils utilisent la MAO parce que la MAO permet de simuler une orchestration complète. Donc avant d’aller faire une séance d’orchestre qui va vous coûter des dizaines de milliers d’euros, faites reproduire l’orchestration complète sur un logiciel de MAO. Les réalisateurs ne lisent pas toujours les partitions et ont du mal à imaginer votre musique si vous la jouez simplement au piano.

La technologie est castratrice.

Tout à fait si on ne la maîtrise pas. Si on la maîtrise, elle devient un outil fantastique et les possibilités sont infiniment supérieures aujourd’hui. Il n’y a qu’à écouter ce qu’ Hans Zimmer arrive à produire comme musique comparé à John Williams, qui reste un maître extraordinaire de la musique acoustique. Mais Hans Zimmer a la dimension MAO en plus et c’est ce qui fait qu’il a un son absolument incroyable sur la plupart de ses films. Sur Inception, c’est extraordinaire comme il réussi à créer un univers sonore en mélangeant de l’électro avec de l’acoustique. Le son qu’il a sur Pirates des Caraïbes est fantastique. Dans Inception, on  retrouve des sons numériques épiques.

Certains considèrent que Prokofiev est le meilleur compositeur de musique de film parce qu’il a fait des musiques de films assez exceptionnels, que l’on rejoue en concerts etc… Maintenant quand Isaac Perlman joue en concert, on ne lui demande pas de jouer en rappel du Beethoven, du Mozart ou du Strauss, on lui demande de jouer la Liste de Schindler de John Williams. Et partout où il va dans le monde, quand il est en rappel, on lui demande la Liste de Schindler.

Conclusion

Je suis content que vous ayez votre opinion, vos goûts et que vous fassiez selon votre conviction. Certains vont continuer à faire des musiques de films avec un papier et un crayon et d’autres qui vont utiliser la MAO. Je dis juste que la technologie  n’est castratrice que si on ne la maîtrise pas. Je disais samedi dernier que vous pouvez tout à fait écrire une partition sur papier et qu’ensuite l’ordinateur vous rejoue immédiatement ce que vous venez d’écrire. Franchement, je ne trouve pas ça castrateur du tout. Je trouve ça carrément génial surtout si vous avez un réalisateur en face.Il va apprécier de pouvoir écouter avec les sons des instruments que vous avez prévus sur votre partition. Ça va vous faire gagner un temps fou!

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